Thérèse PEIREIRA, 49 ans, Portugaise d’origine
Née au Portugal
1973, le régime de dictature de Salazar laisse à la population du pays peu d’espoir d’amélioration de ses conditions de vie. Le pays est exsangue de la guerre menée en Angola.
La famille habite dans un petit village de la région de Guarda. Son père est cordonnier, sa mère factrice, les garçons de la famille sont en âge d’aller à l’armée.
Ils n’arrivent pas à joindre les deux bouts, il y a beaucoup de travail en France. 1969, le père part en premier, il trouve à s’embaucher d’abord comme maçon puis entre dans une usine d’emballage.
L’arrivée en France
Lorsqu’en 1973 la mère et les deux plus jeunes filles partent à leur tour, elles sont les dernières du village à émigrer. Les deux frères aînés restent au pays avec leur tante.
La demande de passeports ayant été refusée, c’est clandestinement que Thérèse passe la frontière espagnole, habillée d’une petite robe rouge à pois blancs !
Quelques centaines de mètres à pied après avoir franchi une rivière et tout le monde reprend le train en Espagne, direction Paris. La famille s’installe dans une petite maison difficilement louée par le père à Jouarre, étant donné la pénurie de logements qui persiste.
Leurs vies en France dans les années 1970
Thérèse ne parle pas un mot de français. Elle est inscrite à l’école, en classe de CPPN (une classe de rattrapage). Soutenue par une de ses professeurs, elle parvient rapidement à intégrer le cycle normal du collège.
Lorsqu’elle atteint ses 16 ans, ses parents souhaiteraient la voir travailler. Le directeur du collège insiste pour qu’elle poursuive ses études jusqu’à 18 ans. Mais elle ne passera pas son baccalauréat.
Sa mère a trouvé du travail dans la même usine que son père, là où travaillent tous les Portugais de Jouarre. Sur la chaîne, on parle portugais, et sa mère n’apprendra pas le français qu’elle parle encore aujourd’hui avec difficultés.
1975, c’est la chute du régime. C’est aussi l’année du premier choc pétrolier. L’immigration est stoppée. Elle reprendra dans les années 1980.
Le projet de retour rêvé par les parents se transforme peu à peu : pas question de repartir sans les enfants...qui se sont mariés et ont maintenant des enfants.
Même si la famille retourne au pays pendant les vacances du mois d’août ; il en sera ainsi tous les ans par la suite. Ce retour annuel porte le nom de « fête de l’immigré ».
Leurs vies aujourd’hui
En 2005, Thérèse et sa sœur demandent leur naturalisation, sans trop en informer leurs parents, pas tout à fait d’accord ; pour les parents, changer de nationalité c’est perdre une part de son identité, de ses racines.
Son frère, qui a épousé une Française, est déjà naturalisé. Aujourd’hui, les parents vivent au Portugal dans une maison de retraite car le père est tombé malade là-bas.
De plus, le coût lié à cette prise en charge rend impossible cet accès en France. Mais sa maman est triste d’être éloignée de ses enfants restés en Seine-et-Marne.